« Il n’y avait rien, il y aurait tout », telle est l’origine de Sophia-Antipolis, doux rêve de réparation d’un homme pour la femme qu’il aime. Bouleversé par l’enfance erratique de Sophia, Pierre veut lui construire une ville, concentré international de Sciences, de Sagesse, de Progrès, d’Intelligence, de Savoir, d’Écologie et de Modernité. À la fin des années 70, l’utopie se concrétise dans « un triangle vide » entre Antibes et les contreforts alpins. Mais dire qu’il n’y avait rien sur le plateau de Valbonne, c’est faire fi non seulement de l’épaisseur mémorielle du territoire mais aussi du hameau de forestage créé par les Eaux et Forêts pour les Harkis. Entre le rien et le tout, Nina Léger décrit avec talent la violence de l’illusion dans son ignorance des innombrables histoires humaines, temporelles, spatiales. Car « l’histoire de Sophia-Antipolis est une lame qui tranche net dans la matière du monde », et c’est la force de l’auteure de tenir les rênes de son sujet et de sa plume. De plus, le problème posé par les Harkis conté par une Française d’origine ukrainienne confrontée à une autre Française d’origine algérienne donne une dimension particulièrement intéressante à ce récit. (D.D. et J.M.)